La fédération France Victimes appelle à élargir la mise en place du bracelet anti-rapprochement

28 janvier 2021 à 5h00 par Lucie Claussin

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Le bracelet sera posé sur l'auteur de menaces/violences et la victime aura le boîtier.
Crédit : Alain Jocard / AFP ©

Depuis quelques mois, les juges français peuvent ordonner le port d'un bracelet anti-rapprochement dans le cadre de violences conjugales, afin de protéger les victimes. La fédération France Victimes, qui soutient et vient en aide aux personnes victimes, propose d'élargir la mise en place de ce dispositif à d'autres situations.

Pour lutter contre les violences conjugales, le gouvernement français propose d'équiper les conjoints ou ex-conjoints violents de bracelets anti-rapprochement, un dispositif de protection permettant de le tenir à distance de la victime. Adopté définitivement par le Parlement le 18 décembre 2019, ce dispositif a été officiellement mis en place le vendredi 25 septembre d'abord dans cinq juridictions puis sur l'ensemble du territoire français.

Plusieurs associations ont d'ores et déjà remis un boîtier anti-rapprochement à des victimes. C’est le cas de la Fédération France Victimes. Jérôme Bertin, son directeur général nous explique son fonctionnement :

 

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Il y a deux zones d’alertes avec ce système de géolocalisations. Il y a une pré-alerte, avec une zone définie par les magistrats, allant jusqu’à 20km. Si l’auteur arrive dans cette zone, cela va déclencher une alerte et un télé-assistant   va le rappeler à l’ordre. Il y a ensuite une alerte immédiate, qui déclenche une intervention immédiate des secours, si l’auteur se trouve dans une zone trop proche de la victime. La victime peut elle aussi alerter, et contacter le télé-assistant en appuyant sur un bouton SOS.

 Ce bouton SOS existe déjà sur le téléphone grave danger. La différence différente entre ces deux dispositifs, est que le bracelet anti-rapprochement, ne nécessite aucune action de la part de la victime. Ainsi, elle n’a pas à rester vigilante, à s’inquiéter ou à rester sur le qui-vive en permanence

À savoir que la mise en place de ce bracelet se fait toujours avec le consentement de la victime. Le bracelet n’est jamais imposé à la victime mais peut l’être en revanche à l’auteur sur le volet pénal. La victime peut aussi renoncer au dispositif si elle le souhaite.

À l’internationale, ce bracelet est déjà mis en place en Espagne et rencontre un succès, avec une baisse significative des violences conjugales.

 

L’association France Victimes 16 mobilisée

L'association France Victimes 16 à Angoulême a participé à la phase test et a d'ores et déjà remis deux boitiers anti-rapprochement à des femmes victimes depuis le mois de novembre. Isabelle Decosterd, directrice de l’association France Victimes 16 nous apporte quelques précisions :

 

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 Au-delà du soutien apporté aux victimes, l’association accompagne de façon globale et individualisée chaque victime, qui pourra y trouver du soutien moral et psychologique, mais aussi juridique et social, et cela dans la durée :

  

Vers une étendue du dispositif ?

 Il pourrait par exemple être mis en place dans le cas de viols et agressions sexuelles commis hors du couple, mais aussi comme mesure de prévention dans le cadre de faits de harcèlement par exemple, avant qu'ils ne dégénèrent en violences physiques.  Dans quels autres types de situations pourrait être appliqué ce dispositif ? Précisions de Jérôme Bertin :

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L’idée serait donc, de prévenir au mieux les passages à l’acte. Selon Jérôme Bertin, il a été constaté que l’homicide conjugal intervient rarement, sans qu’il y ait eu en amont des violences voire des menaces. Il invite dont les magistrats doivent être vigilants sur les situations où il y a déjà de la violence qui s’exprime par des menaces, de la violences psychologique ou physique afin d’éviter le passage à l’acte ultime, le féminicide.

Ce mode de fonctionnement est donc valable dans le cadre de violences conjugales, mais s’applique aussi dans d’autres situations.

 

Un dispositif applicable avant et/ou après une condamnation

  

Actuellement, il existe un dispositif légal baptisé « évaluation de besoins de protection des victimes ». C’est une mesure qu’un magistrat peut demander ; une association prendra ensuite le relai et sera chargée d’évaluer avec la victime ses besoins de protection, afin que le bilan tiré puisse servir aux magistrats afin de rendre leurs décisions.

Il sera ainsi possible de prendre une mesure d’éloignement, avec ou sans téléphone grave danger, avec ou sans bracelet anti-rapprochement. L’intérêt de ces dispositifs, est qu’ils peuvent être mis en place avant toute décision judiciaire, s’il est estimé qu’avant la condamnation de l’auteur, il y a un risque de passage à l’acte très violent.

Un juge aux affaires familiales, dans le cadre d’une demande d’ordonnance de protection, peut aussi décider l’attribution d’un bracelet anti-rapprochement, en ayant recueilli l’assentiment de l’auteur et le consentement et de la victime.

 La fédération France Victimes souhaite aussi que soit mis en place au sein des juridictions, des comités de suivi au sujet de ces bracelets. Ils réuniraient les associations agréées ainsi que les juridictions, les avocats… afin d’évaluer l’efficacité de la mesure, les besoins et les demandes.

Ces comités pourraient analyser les moments où sont attribués ces bracelets, pourquoi ils ne sont pas attribués, quels sont les difficultés pour les victimes, quelles sont les freins dans le recueil du consentement… Objectif : savoir dans un futur proche ce qui fonctionne, et s’il faut modifier les textes.   

Le bracelet anti-rapprochement est maintenant déployé dans toute la France. Un dispositif dont le coût est estimé entre 5 et 6 millions d’euros.

  

Numéros d’aides et informations utiles

 

Chaque jour, des milliers de femmes subissent des violences conjugales en France. Si vous êtes victimes ou avez besoin d’aide et d’informations, vous pouvez contacter le 3919, ou le numéro national d’aide aux victimes 116 006.

A savoir que France Victimes a aussi créé la plateforme « Mémo de vie », pour tenter d’améliorer le quotidien des victimes, en leur offrant un exutoire et un endroit où elles pourront rassembler des preuves contre les violences subies.