Les médecins inquiets de l’essor des pratiques des soins non-conventionnelles

3 juillet 2023 à 11h36 par Étienne Escuer

L'acupuncture fait partie des pratiques de soins non-conventionnelles.
L'acupuncture fait partie des pratiques de soins non-conventionnelles.
Crédit : Pixabay - Photo d'illustration

Les médecines dites alternatives connaissent un succès de plus en plus grand dans la population. Au détriment parfois de la médecine conventionnelle, ce qui inquiète les praticiens.

Mieux encadrer les médecines dites alternatives : une réunion s’est tenue mercredi 28 juin à l’initiative du gouvernement, pour installer un comité d’appui sur cette question. Ces pratiques, comme la naturopathie, la chiropraxie, ou encore la kinésiologie et dont l’efficacité n’est pas prouvée scientifiquement, connaissent un fort essor ces dernières années. « 70% des Français ont eu recours au moins une fois à une pratique de soin non-conventionnelle », indique le docteur David Beausire, membre du collectif NoFakeMed. « C’est un chiffre qui augmente, notamment avec la crise sanitaire et l’évolution des mentalités sur l’écologie et l’environnement. »

 

Ces pratiques peuvent-elles être considérées commes dangereuses ? « Oui et non » confie David Beausire. « Quand elles s’inscrivent en marge d’une pratique conventionnelle, qu’on laisse traiter par exemple un diabète par des pratiques reconnues, je n’ai rien contre l’idée contre les gens y aient recours. » Selon le médecin, « le danger est possible dès lors qu’il y a des dérives et qu’elles aboutissent à se marginaliser de la médecine conventionnelle. Ça peut être une approche complémentaire dès lors que ça reste une approche complémentaire, pas alternative. » Outre l’abandon des soins conventionnels, le collectif NoFakeMed alerte également sur le risque de dérives sectaires. 70% des signalements que reçoit la Miviludes, la mission interministérielle chargée de lutter contre les dérives sectaires, concernent les pratiques de soins non-conventionnelles.

 

Un phénomène multi-factoriels

 

L’augmentation du recours aux pratiques de soins non-conventionnelles ces dernières années serait plurifactorielle, avance David Beausire. « La défiance qu’on a pu donner à la population avec la vaccination pendant la crise covid et les débats sur l’hydroxychloroquine, par exemple, ont pu détourner des gens de la médecine traditionnelle », explique-t-il. « On a aussi le fait que le discours prôné par ces disciplines-là est souvent plus rassurant que le nôtre, auprès de personnes fragilisées. » Enfin, l’état du système de santé français joue également un rôle important, avec des médecins de moins en moins nombreux et accessibles, tandis que l’accès aux pratiques de soins non-conventionnelles s’est lui démocratisé, certaines étant jusqu’à peu encore proposées sur des sites comme Doctolib.

 

Le gouvernement doit-il mieux encadrer ces pratiques de soins non-conventionnelles ? La question n’a pas de réponse simple. « Il y a plusieurs approches à prendre en compte », rappelle David Beausire. « Sociétale », car le gouvernement doit tenir compte des envies de la population. « De santé publique », aussi, si ces pratiques ont des risques pour les citoyens, et enfin « économique », sur la question par exemple du remboursement par la sécurité sociale de ces pratiques. Comment alors réconcilier les Français avec la médecine conventionnelle ? « En donnant accès aux professionnels en nombre suffisant, déjà », estime David Beausire. « Ensuite, il y a du ménage à faire côté médical, et de l’information de l’acculturation à avoir au niveau de la population. » Le collectif NoFakeMed admet toutefois qu’il s’agit « d’un sujet très complexe qui dépasse le cadre de la médecine. »