Malgré les pluies du printemps, un risque de sécheresse élevé cet été
25 mai 2023 à 11h00 par Étienne Escuer
Pourquoi le risque de sécheresse est-il important pour l’été 2023, malgré un printemps qui a semblé pluvieux ?
Le printemps 2023 vous a peut-être semblé pluvieux, notamment les mois de mars et avril. Difficile alors peut-être de comprendre les craintes de sécheresse qui pèsent sur l’été, le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) ayant récemment estimé que 68% des nappes phréatiques françaises avaient un niveau inférieur aux normales de saisons. « Dans le nord de la France ou la Bretagne, on a en fait eu un printemps dans la moyenne en termes de précipitations », rappelle Davide Faranda, chercheur et climatologue au CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique). « Dans le sud de France, on a en revanche eu un déficit de pluie, qui perdure encore. » Comment expliquer alors cette différence entre notre ressenti et la réalité statistique ? « On a un biais cognitif : comme notre corps a besoin de soleil et de vitamine D, on a tendance à oublier quand il fait beau. C’est pour ça que notre travail est de vérifier cela avec des statistiques », explique Davide Faranda.
Un hiver sec aux nombreuses conséquences
Le printemps 2023 a en fait été marqué par des épisodes orageux intenses, mais courts. « Ces pluies orageuses ou diluviennes ne sont pas bénéfiques, surtout si le sol est très sec comme on a eu cet hiver. Les pluies se sont écoulées en surface sans pénétrer dans les nappes phréatiques », détaille le climatologue. « Quelques jours de pluies orageuses, ce n’est pas suffisant pour remplir les nappes. Au contraire, ça peut même créer des dégâts comme en Emilie-Romagne (Italie). Un premier épisode de pluie a contribué à modifier la géographie des rivières car l’eau s’écoulait en surface. Cela a causé des inondations lors des épisodes pluvieux suivants. » La sécheresse hivernale a donc eu de fortes conséquences ces derniers mois en rendant les sols secs et imperméables. Qui plus est, un deuxième problème s’est posé cet hiver. « La neige est un réservoir d’eau. Peu de neige en hiver comme cette année en France, cela impacte le niveau des nappes pour la saison estivale », explique Davide Faranda.
Des phénomènes de plus en plus fréquents et intenses
A ce stade de l’année, le risque de sécheresse estivale (notamment dans le centre et le sud de la France) est donc encore plus important qu’en 2022, année déjà très sèche. La récurrence de ces épisodes de sécheresse inquiète d’ailleurs. « On va vers une augmentation de ces successions d’épisodes secs puis de pluies diluviennes. La végétation et les nappes ne sont pas faites pour ces conditions », alerte le climatologue, dont les travaux portent sur la responsabilité de l’humain quant à ces phénomènes. « Nos études démontrent que les émissions de CO2 augmentent la température, qui impacte ensuite la pression atmosphérique. Les zones de haute pression sont plus intenses et repoussent les tempêtes hivernales. Cela cause une accumulation d’énergie qui s’évacue sous forme d’orages », explique Davide Faranda. « Si on continue avec les émissions de gaz à effet de serre, ces phénomènes vont s’intensifier. »
Pour le climatologue du CNRS, il convient donc de réduire rapidement nos émissions de gaz à effet de serre. « Il faut faire des efforts pour suivre les accords de Paris sur le climat car les événements de pluies extrêmes et de sécheresse vont être plus intenses et il sera compliqué de s’adapter », conclut Davide Faranda. « Sinon, on va avoir des pertes en termes d’agriculture mais surtout de vies humaines, comme ces derniers jours en Italie. »