Oradour-sur-Glane : une collecte de dons pour préserver le village martyr

27 juin 2023 à 7h00 par Étienne Escuer

Les ruines du village martyr d'Oradour-sur-Glane s'abiment.
Les ruines du village martyr d'Oradour-sur-Glane s'abiment.
Crédit : Benoit Sadry - Fondation du Patrimoine

Une collecte de dons est lancée par la Fondation du Patrimoine pour préserver Oradour-sur-Glane. Les ruines du village martyr de Haute-Vienne se détériorent rapidement.

Préserver les ruines du village martyr d’Oradour-sur-Glane : c’est le but d’une collecte de dons lancée par la Fondation du patrimoine. En effet, ce qu’il reste du site où les Nazis ont massacré 643 civils le 10 juin 1944 se détériore rapidement depuis quelques années. « 80 ans après, les murs ont aussi subi l’outrage des saisons et des intempéries diverses », confie Benoit Sadry, président de l’association des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane et délégué départemental de la Fondation du patrimoine. « Il y a également une invasion de certains végétaux, comme le lierre, qui présente un danger pour la conservation. »

 

Pour autant, Benoit Sadry l’assure, l’État a bien entretenu le site ces dernières décennies. « Le budget était conséquent, 300.000 euros par an, avec aussi des crédits ponctuels pour certains bâtiments. Une enveloppe de 500.000 euros a par exemple été dégagée pour l’église », rappelle-t-il. La majeure partie du village a en fait été construite en torchis, une matière qui se désagrège au fil du temps. « Ça fait 80 ans que les murs ne sont plus couverts et que l’eau s’infiltre. C’est un véritable chantier sur chacun des murs du village. Un mur qui tombe peut entrainer deux ou trois maisons derrière », poursuit Benoit Sadry.

 

Plus aucun témoin du massacre vivant

 

Cette année, le dernier témoin vivant du massacre, Robert Hébras, est décédé. « Ça nous semble important qu’aujourd’hui, au moment où la mémoire des témoins disparait, la mémoire des pierres continuent. Ces pierres, elles parlent », confie Benoit Sadry. « L’année prochaine, ce sera le 80ème anniversaire du massacre, et je pense que ce sera un symbole fort de montrer que le chantier est lancé pour préserver ces ruines. Et ce afin de rappeler ce qu'il s’est passé : un crime de masse commis contre des Français en plein cœur de la France par une armée en déroute. »

 

Estimer le coût total des travaux est difficile, car cette opération n’a jamais été effectuée ailleurs. « Le seul point de comparaison, c’est avec l’église qu’on vient de protéger : 500.000 euros pour un seul bâtiment », indique le délégué départemental de la Fondation du patrimoine. « Dans le village, il y a 300 bâtiments dont 123 maisons d’habitation. » Pour financer ces travaux, une délégation s’était rendue à l’Élysée il y a quelques semaines pour réclamer la mise en place d’une souscription nationale et internationale. « A plus petite échelle, c’est un peu l’idée de la collecte solidaire pour Notre-Dame », estime Benoit Sadry, qui rappelle que d’autres villes, en Europe notamment, ont subi le même sort d’Oradour-sur-Glane sans qu’il n’en reste de traces aujourd’hui.

 

Un engagement citoyen

 

La commune se tourne donc vers les collectivités, mécènes et le grand public via cette initiative. « On s’est engagés depuis 80 ans à ce que ce village soit en accès gratuit, pour qu’un maximum de gens puissent voit de l’horreur de la guerre », explique Benoit Sadry. « Aujourd’hui, on demande aux personnes qui ont pu venir par le passé une sorte d’engagement citoyen. Ce lieu de mémoire nationale, il appartient un peu à tout le monde, ce n’est pas seulement le passé des gens d’Oradour-sur-Glane. Il a été conservé pour maintenir l’ensemble de la mémoire des villages qui ont subi le même sort. »

 

Outre la préservation des ruines d’Oradour-sur-Glane, la Fondation du patrimoine espère en effet que cette collecte participera au travail de mémoire. « Ça peut aussi nous conduire à nous interroger sur ce qu’il se passe à quelques heures d’avion de Paris, dans l’est de l’Europe, avec des villes détruites, des vies de civils fauchées », confie Benoit Sadry. « Je crois que ça a toute son importance de montrer qu’on n’oublie pas et qu’on conserve volontairement ce lieu pour essayer que ça ne se reproduise pas ailleurs. »

 

Un premier palier de financement a été fixé à 2 millions d’euros, mais « c’est très en-deçà de l’argent qu’il faudra à terme pour maintenir en état tout le village et le transmettre pour les décennies du suivront », conclut Benoit Sadry. Pour faire un don, rendez-vous sur le site internet de la Fondation du Patrimoine.