Des crèmes solaires et anti-âge deviennent cancérigènes en vieillissant

8 mars 2021 à 9h05 par Iris Mazzacurati

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Retrouvée dans certains cosmétiques, cette substance facilement absorbée par la peau, peut constitue
Crédit : Pixabay - photo d'illustration

Elles sont censées protéger notre peau des agressions du soleil et de l'âge. Elles pourraient nous rendre malade... Un filtre de protection solaire présent dans certaines crèmes solaires et anti-âge se dégrade en un composé "perturbateur" hormonal, soupçonné d'être cancérogène.

Des chercheurs recommandent de les bannir de votre trousse de toilette. Pour les repérer, il suffit de lire la liste des ingrédients qui figure au dos du flacon de votre produit de soin.

L’ingrédient incriminé : l'octocrylène, que l'on retrouve dans de nombreux cosmétiques (crèmes hydratantes, autobronzantes, shampooings, etc.). Avec le vieillissement du produit, il se transforme en benzophénone, qui s'accumule rapidement, selon cette équipe franco-américaine qui a analysé une quinzaine de crèmes solaires et anti-âge achetées en France et aux Etats-Unis.

Leurs travaux sont parus lundi 8 mars dans une revue spécialisée de la Société américaine de chimie, Chemical Research in Toxicology.

Interdit dans plusieurs territoires

L'octocrylène est accusé d'être néfaste pour la vie marine, en particulier pour les coraux. "Certains fabricants l'ont retiré de leurs crèmes solaires pour des raisons environnementales", constate Philippe Lebaron, biologiste du laboratoire de biodiversité et biotechnologie microbienne de l'Observatoire de Banyuls-sur-Mer (Sorbonne Université/CNRS, France) co-auteur de l'étude.

L'octocrylène a été interdit dans les protections solaire des territoires possédant des récifs coralliens, comme les îles Vierges américaines ou la république des îles Marshall.

La benzophénone est classée comme "peut⬐être cancérogène pour l'homme (Groupe 2B)", par le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC/Iarc) de l'OMS. Et selon cette agence sanitaire, il existe des preuves suffisantes chez les animaux de laboratoire du risque de cancers dus à la benzophénone.

Chez l'animal, l'exposition à la benzophénone induit des cancers du foie et des lymphomes, notent les chercheurs qui pointent également des problèmes dermatologiques.

Les produits achetés ont subi un procédé de vieillissement accéléré validé aux Etats-Unis, et équivalent à un an passé à température ambiante. Puis ils ont été analysés à l'aide d'un spectromètre de masse de haute performance, indique le Pr Lebaron.

"Au départ, il y a très peu de benzophénone dans les produits. Mais progressivement avec le vieillissement du produit, il y a de plus en plus de benzophénone", dit-il à l'AFP.

Une substance facilement absorbée par la peau

"Des augmentations de benzophénone dépassant les 100% et même atteignant les 200% ont ainsi été observées", ajoute le biologiste. "C'est la première fois que l'on montre cette dégradation de l'octocrylène en benzophénone". Un argument de plus, selon lui, pour l'interdire dans les produits de soins personnels.

Soulignant que cette substance est facilement absorbée par la peau, les chercheurs estiment que les produits à base d'octocrylène, et donc contaminés par de la benzophénone, peuvent constituer une menace pour la santé ainsi que pour l'environnement.



(Avec AFP)