Un ancien Angevin va traverser l’océan atlantique à la nage en solitaire
12 avril 2023 à 6h00 par Hugo Harnois
« Cul salé » né en Guérande, Fabien Leroux souhaite traverser l’océan atlantique à la nage en solitaire pour sensibiliser à la pollution plastique des océans. Portrait d’un homme à la tchatche communicative.
La traversée de l’atlantique à la nage en 50 jours. C’est le projet fou dans lequel s’est lancé Fabien Leroux. Né en Guérande et ayant passé plusieurs années de sa vie à Angers – une ville superbe qu’il adore – le directeur commercial a passé toute son enfance et son adolescence près de l’océan. « C’était facile d’évoluer dans ce milieu aquatique, j’ai fait beaucoup de sport, de la plongée, de l’apnée, c’est quelque chose qui me parlait directement », se souvient-t-il aujourd’hui.
"Je serais le premier à le faire en solitaire et sans assistance, en pure nage"
En 2018, Fabien Leroux est victime d’un AVC, et sa vie prend alors un tournant. Le neurologue lui conseille à l’époque six mois d’arrêt, il ne le croit pas, et démarre alors pour lui un combat intérieur. « La nuit, j’ai débranché mes fils, j’ai commencé à marcher, j’ai fait trois fois le tour du service puis un footing de 45 minutes ». Cinq ans plus tard, l’homme n’en garde quasiment aucune séquelle, si ce n’est une absence de sensibilité au bout de ses doigts à la main droite.
Suite à cet AVC, Fabien Leroux décide de se lancer dans cette aventure qu’a déjà réalisée Guy Delage en 1985. À la différence qu’il serait « le premier à le faire en solitaire et sans assistance, en pure nage. » Le directeur commercial est censé partir le 16 décembre prochain du Cap Vert, parcourir précisément 3920 km, et arriver 50 jours plus tard à la Barbade. Le sportif prévoit de nager 12 heures par jour, divisé en trois séquences de quatre heures chacune. Un premier tiers réalisé en bipalmes ; une pause de deux heures ; un deuxième en monopalme – « j’essaie de me prendre pour la Petite Sirène » ; une nouvelle pause de deux heures ; et un dernier tiers en bipalmes. « Après c’est la nuit, je ferai dodo, et je pense que Morphée n’aura pas le temps de venir frapper à mon carreau que, la tête sur l’oreiller, je serai déjà parti », poétise Fabien.
"C'est pas l'homme qui prend la mer..."
Durant son trajet, l’homme-poisson sera seul au monde, ou presque, puisqu’il suivra un radeau, « un prototype unique au monde », comme il le stipule. Dessiné par un architecte naval, il lui servira de « maison ambulante » avec, à l’intérieur : de la nourriture embarquée, des éléments technologiques comme un dessalanisateur transformant l’eau de mer en eau douce, ou encore des batteries reliées aux panneaux solaires, pour être « en autonomie complète ». Le radeau comporte aussi un GPS : « sur l’avant et l’arrière du bateau, il y a des safrans reliés par un pilote, lui-même connecté à un GPS. Donc si jamais j’ai un vent de travers qui pousse mon bateau sur le côté, les safrans vont pivoter de manière à ce que le radeau garde le même cap, c’est ma boussole ».
Pour mener à bien sa mission, Fabien Leroux a également un moteur sentimental. En effet suite à son AVC en 2018, le médecin lui avait conseillé six mois d’arrêt. Lui n’en a pris qu’un seul, qu’il a passé avec son père, atteint à l’époque d’un cancer en phase terminale : « je me souviens de la fierté qu’un papa peut avoir quand l’un de ses enfants lui annonce qu’il va faire l’Everest ou le Mont Blanc. Moi en l’occurrence, c’était l’Atlantique. Mais aussi la déception qu’il avait dans ses yeux car il savait qu’il était foutu et qu’il ne le verrait pas. Et ça, c’est un truc qui ne me fera pas abandonner, je ne lâcherai jamais rien. »
Entrainement intensif
Pour se préparer en amont, l’ancien Angevin a choisi d’avoir comme voiture de fonction un van californien afin d’être « en autarcie, dans un milieu un peu confiné. » Ce moyen de déplacement lui permet aussi, après le travail, d’aller dans ses « spots d’entrainement, des lacs, en mer. Ça me connecte et me prépare vraiment à ce qui va m’arriver durant cette traversée. » Aujourd’hui, il court tous les matins trois quarts d’heure et nage 2h30 à 3h tous les soirs. « C’est quand même ma troisième année de préparation. On s’est pris le Covid, une récession économique terrible, la guerre, et pour trouver des partenaires, c’est dur. C’est la traversée dans la traversée. Le jour où je vais mettre mon cul dans l’eau, ça va être un soulagement incroyable. », avoue-t-il.
Le nageur se lance dans ce défi pour sensibiliser à la pollution plastique des océans. Il a créé avec sa fille – la plus aquatique de la famille, elle est championne de France de natation synchronisée – l’association Ocean Heart. En parallèle de sa traversée, un travail pédagogique est effectué auprès de neuf écoles qui vont suivre son aventure. « J’aurai un système de communication, comme dans le Vendée Globe, et on pourra faire aussi des lives pour leur montrer ce que je vis, ce que je vois. » Enfin, Fabien Leroux placera des capteurs sous la coque de son radeau, qui seront immergés et permettront d’analyser la turbidité, la salinité et la température de l’eau pendant tout son voyage. Les données récoltées seront ensuite transmises à l’Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer).
« J’ai hâte, vous ne pouvez pas imaginer », confesse-t-il à quelques mois du jour J. Rendez-vous donc aux alentours du 5 février 2024 pour prendre des nouvelles de Fabien Leroux. Car nous aussi, nous sommes pressés de prendre des nouvelles de ce « cul salé ».